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Revue n° 36, 1999

Un monde, une monnaie

Les crises monétaires qui, ces dernières années, ont secoué notamment le Mexique, le Brésil, la Russie et l’Asie du Sud-est, ont montré la fragilité du système financier international.

Si certains pays ou régions ont été relativement épargnés à ce jour par les graves difficultés et les désordres économiques induits par ces crises, les spécialistes de la finance internationale ont à plusieurs reprises émis des mises en garde contre un possible effet domino qui étendrait ces effondrements dans d’autres régions, voire dans le monde entier.

Ces avertissements s’appuient sur le fait, aujourd’hui avéré, que l’économie mondiale est désormais totalement intégrée. Si cette intégration apporte de la richesse et de la souplesse, elle requiert aussi de porter une plus grande attention à l’ensemble du système et nécessite une plus grande coopération.

Les chefs de gouvernement, les économistes, les chefs d’entreprise et d’autres acteurs ont donc recommandé une réforme du système financier mondial. Alors que les décideurs examinent les options possibles, l’idée longtemps écartée d’un système monétaire international mérite un examen approfondi.

Au moment où l’interdépendance et l’intégration se renforcent de plus en plus sur tous les fronts, un « système monétaire uniforme et universel » serait un moyen parmi d’autres de « simplifier et faciliter les relations et la compréhension entre les nations et les races ». C’est ce qu’écrivait, en 1936, Shoghi Effendi qui a dirigé la communauté bahá’íe à travers le monde de 1921 à 1957.

Une monnaie unique serait en quelque sorte une langue internationale qui permettrait d’améliorer les communications dans le monde entier. Elle éliminerait les problèmes liés à la spéculation, à l’instabilité et à l’incertitude et serait une base solide pour l’économie mondiale. Elle réduirait sensiblement les coûts et les risques liés à la pratique du commerce international.

Une monnaie internationale serait aussi un pas en avant vers plus de justice économique dans le monde, supprimerait l’avantage que confère à quelques pays privilégiés la possession d’une monnaie considérée comme plus forte ou plus stable et mettrait les pauvres à l’abri des fluctuations monétaires. A long terme, elle serait un contrepoids aux difficultés locales induites parfois par la mondialisation de l’économie en plaçant chacun, à chaque endroit sur un pied d’égalité.

L’idée d’une monnaie unique n’est pas neuve. L’économiste John Maynard Keynes avait déjà proposé une « union monétaire internationale » dans les années 1940. Cette idée a été écartée à la Conférence de Bretton Woods par les diplomates qui, redoutant un changement aussi radical, ont préféré mettre en place le Fonds monétaire international et la Banque mondiale. Plus récemment, The Economist, l’un des journaux financiers les plus orthodoxes, écrivait dans un article du 26 septembre 1998 que le thème « un monde, une monnaie » méritait « un moment de réflexion ». Une monnaie internationale serait certainement un moyen efficace pour résoudre le problème immédiat des crises monétaires régionales.

Dans le système actuel, plus d’un trillion de dollars change de mains chaque jour, les investisseurs cherchant à obtenir le plus grand profit au moindre risque. Ces mouvements monétaires sont gérés par des professionnels qui doivent anticiper ou se protéger contre des taux de change défavorables, ce qui les conduit souvent à spéculer pour ou contre certaines monnaies. Les gouvernements interviennent aussi souvent pour conforter la position de leur monnaie ou obtenir des avantages commerciaux. Le système est fondamentalement injuste dans la mesure où des pays dont la monnaie sert de monnaie de réserve font des bénéfices injustifiés par rapport aux pays moins favorisés.

L’instabilité des taux de change entre les monnaies gêne le commerce et les investissements internationaux, la planification des entreprises et les économies nationales car elle a des répercussions sur les prix et l’inflation. Tout mouvement se traduit non seulement par des gagnants et des perdants mais aussi par des pénalités économiques générales. Si un pays opte pour un taux de change fixe, sa politique monétaire doit défendre ce taux ; s’il opte pour un flottement contrôlé, il prête le flanc à la spéculation. Les banques centrales peuvent intervenir pour défendre leur monnaie mais les grandes crises monétaires actuelles peuvent en peu de temps engloutir les réserves nationales et nécessiter une aide internationale d’urgence, aide qui s’est chiffrée ces dernières années en dizaines de milliards de dollars.

L’aspect psychologique est important dans les crises monétaires car la situation dépend en grande partie de la confiance qu’ont les investisseurs dans telle ou telle monnaie. Or, la confiance est vite ébranlée et difficile à rétablir. Une monnaie mondiale supprimerait non seulement toute possibilité de spéculation mais elle serait aussi un gage de confiance universelle.

Maintes objections d’ordre aussi bien rationnel qu’affectif ont été soulevées contre la monnaie mondiale. Une monnaie unique imposerait à tous les pays une même rigueur économique et les obligerait à faire face à des réalités déplaisantes. Les gouvernements ne pourraient plus tirer sur la planche à billets comme bon leur semble ni oublier qu’ils ne peuvent indéfiniment vivre au-dessus de leurs moyens. Pourtant, à bien des égards, une monnaie unique aurait à l’évidence des effets positifs.

Certains pensent que la meilleure façon de se protéger contre les fluctuations internationales serait de multiplier les monnaies locales gérées individuellement et ainsi de mettre les économies nationales à l’abri d’attaques extérieures. Si cette solution est valable dans un système de monnaies fluctuantes, l’existence d’une monnaie unique supprimerait en réalité une cause importante d’attaques de ce genre.

Pour d’autres, l’abandon des monnaies nationales et des marchés de change risque d’augmenter le chômage dans certaines régions, à la fois parce que certaines activités deviendraient superflues et qu’un terrain de jeu économique plus ouvert et plus nivelé risque de détourner certains emplois au profit de certaines régions. Or, c’est ce qui se passe déjà, au mépris de tout sentiment de justice et contrairement à celui que contient l’idée d’une monnaie mondiale avec son pouvoir nivellateur.

D’autres enfin craignent que cette marche vers l’unité mondiale ne représente un abandon supplémentaire de pouvoir au profit d’intérêts puissants et de bureaucraties distantes. Dans le même ordre d’idées, la monnaie est le symbole de la souveraineté nationale et il n’est pas facile d’y renoncer. Pourtant, comme le montre le lancement de l’Euro, il est possible de se passer de tels symboles si on en retire des avantages importants.

La création d’une monnaie unique doit s’accompagner de nombreuses autres mesures d’intégration et d’harmonisation. Il faudrait mettre en place une autorité monétaire mondiale forte et effective ou une banque centrale qui œuvrerait pour l’intérêt commun et aurait politiquement les mains libres pour gérer la monnaie mondiale, réguler l’offre monétaire et garantir des liquidités suffisantes sans inflation. Parallèlement, il faudrait mettre en place d’autres mécanismes décisionnels mondiaux visant à établir la confiance et le consensus entre les gouvernements de la planète.

Cette monnaie mondiale ne résoudra pas en elle-même tous les problèmes du monde. Si elle est un élément indispensable à l’appui d’un système économique plus juste et plus efficace, ce dernier n’est lui-même qu’une facette du fédéralisme qui doit accompagner la mondialisation et réaliser la paix et l’unité. En définitive, on ne pourra résoudre les problèmes économiques par des moyens techniques que si la vie économique est animée d’un esprit nouveau et si on fonde le nouveau système économique sur des principes spirituels. La monnaie elle-même doit être remise à sa place comme un moyen d’échange plutôt que comme une mesure de la performance économique ou du développement. Les valeurs économiques doivent être pondérées par des valeurs sociales et spirituelles.

Une monnaie unique peut paraître un but lointain mais on ne peut nier la logique de l’institution de cette monnaie en tant que moyen pour résoudre certains problèmes graves qui menacent notre bien-être économique. En réalité, compte tenu du mouvement vers l’interdépendance et l’intégration, le fait que cette monnaie unique soit souhaitable et, en fin de compte, inévitable, invite les dirigeants du monde à se pencher sur cette question sans plus tarder.



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