Revue n° 10, 1992
Débat aux Nations Unies sur les droits de l’homme : la situation des bahá’ís en Iran suscite toujours “de vives préoccupations”
GENEVE — Une déclaration d’août 1991, à la Sous-Commission des Nations Unies sur la prévention de la discrimination et la protection des minorités, expose que, malgré des améliorations isolées et sporadiques dans le traitement individuel réservé aux bahá’ís en Iran, la campagne de persécution se poursuit à l’encontre des 300.000 membres de leur communauté.
M. Techeste Ahderom, représentant de la Communauté internationale bahá’íe auprès des Nations Unies, a déclaré devant la Sous-Commission, le 13 août dernier, que les récentes arrestations et l’emprisonnement de plusieurs bahá’ís ainsi que la poursuite des discriminations contre la communauté dans son ensemble, sur les plans économique, éducatif et religieux, confirment la nécessité de maintenir le contrôle international en ce qui concerne la situation des droits de l’homme pour les bahá’ís en Iran.
« Depuis 1979, cette vague de persécutions a profondément affecté toute une génération de bahá’ís qui ont vécu chaque jour en sachant que, uniquement en raison de leur croyance religieuse, ils ne bénéficiaient d’aucun droit », déclare M. Ahderom. « Aussi, les bahá’ís en Iran ne peuvent-ils continuer à compter que sur la vigilance de la communauté internationale, principale source de protection pour eux. »
19 voix contre 2
Après les témoignages de M. Ahderom et ceux d’autres personnes et organisations sur une détérioration générale de la situation des droits de l’homme en Iran au cours de l’année écoulée, la Sous-Commission a adopté le 23 août dernier, par un vote de 19 voix contre 2 et 1 abstention, une résolution exprimant ses « profondes préoccupations » quant à la situation générale des droits de l’homme en Iran.
La résolution invite également la Commission des Nations Unies sur les droits de l’homme à maintenir la surveillance de la situation des droits de l’homme en Iran, en prorogeant le mandat de son représentant spécial qui a enquêté, ces dernières années, sur les conditions qui règnent en Iran. La Commission s’est réunie à nouveau en février dernier.
La Sous-commission a aussi explicitement noté que la situation de la communauté bahá’íe en Iran continue à susciter de « vives préoccupations » et elle a donc décidé « d’examiner la situation des droits de l’homme en République islamique d’Iran, y compris celle des groupes minoritaires tels que la communauté bahá’íe », en août 1992, lors de sa prochaine session.
Augmentation du nombre de prisonniers
Dans sa déclaration devant la Sous-Commission, M. Ahderom a précisé qu’en juillet 1991 on comptait 10 bahá’ís incarcérés en Iran, à cause uniquement de leur croyance religieuse. Ce chiffre a légèrement augmenté depuis janvier, il n’y avait alors que 7 bahá’ís en prison.
« Après plusieurs années, au cours desquelles le nombre de bahá’ís emprisonnés en Iran a progressivement diminué, ces augmentations reflètent la précarité de la situation des bahá’ís en Iran », déclare M. Ahderom.
« ...tant que les bahá’ís sont officiellement considérés comme des “infidèles non-protégés” et ne bénéficient d’aucune sorte de protection aux termes de la législation de la République islamique d’Iran, toute amélioration substantielle de leur situation peut, en un instant, être totalement remise en question. »
M. Ahderom a également déclaré que les discriminations en matière économique, éducative et autres se poursuivent à l’encontre des bahá’ís :
« Victimes d’un réel étranglement sur le plan économique, des milliers de bahá’ís, congédiés de leur poste de fonctionnaires et d’enseignants du fait de leur croyance religieuse, demeurent sans emploi et sont officiellement privés des pensions de retraite auxquelles ils ont droit.
La délivrance et le renouvellement des licences commerciales pour les bahá’ís s’effectuent de façon inconséquente et les agriculteurs bahá’ís se voient toujours refuser l’accès aux coopératives agricoles... En outre, de nombreuses propriétés, privées ou commerciales, appartenant à des bahá’ís et arbitrairement confisquées au cours des douze dernières années, sont désormais vendues aux enchères par le gouvernement. »
Restrictions en matière de déplacement
Selon M. Ahderom, les bahá’ís ne sont toujours pas autorisés à voyager librement. Alors que 380 demandes de passeport étaient soumises en 1990, seulement 61 passeports ont été délivrés, la plupart à des personnes malades ou âgées. Depuis mars 1991, la remise des passeports à des bahá’ís est complètement arrêtée.
Même si, récemment, des enfants ont été réadmis dans des écoles élémentaires et secondaires, les bahá’ís ne sont toujours pas admis dans les établissements d’éducation supérieure.
Depuis 1979, 197 bahá’ís iraniens ont été tués, 15 autres sont portés disparus et présumés morts. La fréquence de tels meurtres s’est ralentie vers la fin 1987, pourtant 2 bahá’ís ont été exécutés, en décembre 1988.
Depuis le milieu des années 80, l’Assemblée générale des Nations Unies n’a cessé d’exprimer ses préoccupations quant à la situation des droits de l’homme en Iran.
M. Ahderom a rappelé que la communauté bahá’íe en Iran n’est liée à aucun mouvement d’opposition, à aucune idéologie ou gouvernement. « Bien au contraire, selon les principes de leur Foi, les bahá’ís doivent obéissance au gouvernement du pays dans lequel ils résident », déclare-t-il. « Ainsi, ils ne constituent pas une menace pour le gouvernement iranien ». Et il ajoute : « Ils souhaitent seulement bénéficier des mêmes droits que les autres citoyens d’Iran et pratiquer librement leur religion, individuellement et en tant que communauté. »
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