Revue n° 31-32, 1998
Les communautés bahá’íes du monde entier se mobilisent en faveur de la campagne d’information sur les droits de l’homme
WASHINGTON — La Constitution des États-Unis présente cette particularité que tous les traités internationaux doivent être ratifiés à la majorité des deux-tiers par le sénat – organe législatif composé de deux représentants de chacun des 50 États de ce pays.
En vertu de cette caractéristique, même les traités les plus respectables peuvent ne pas être approuvés, quand bien même les législateurs les appuient massivement. Les étudiants en histoire savent bien que c’est le président Woodrow Wilson qui a lui-même proposé la création de la Ligue des Nations il y a environ 80 ans mais que le sénat américain a refusé de ratifier l’adhésion de l’Amérique.
La Convention des Nations Unies sur l’élimination de toutes les formes de discrimination à l’égard des femmes, accord international adopté par plus de 160 pays,n’a toujours pas été ratifiée par les États-Unis.
Aux États-Unis, une large coalition d’organisations non gouvernementales (ONG) vient de relancer une campagne en faveur de la ratification de la Convention, qui, comme son nom l’indique, vise à mettre fin à la discrimination à l’égard des femmes dans le monde. L’Assemblée spirituelle nationale des bahá’ís des États-Unis, entre autres, a joué un rôle particulier à cet égard.
Par l’intermédiaire du réseau Internet et d’autres moyens de communication, l’Assemblée – conseil d’administration élu démocratiquement qui administre les affaires de la communauté bahá’íe au niveau national – a demandé à ses membres d’écrire à leurs sénateurs pour leur enjoindre de ratifier la Convention.
L’intérêt de cette démarche tient au fait qu’il existe des communautés locales bahá’íes actives dans chaque État. L’Assemblée peut donc s’appuyer sur une organisation locale bien implantée alors que d’autres membres du groupe des ONG qui appuient la Convention ne sont pas aussi bien représentés.
Une fonction spéciale
« Il y a des bahá’ís implantés dans plus de 7 000 localités des États-Unis et représentent toutes les races, les cultures, les religions et les origines ethniques, » dit Kit Cosby, coordinateur des affaires extérieures de l’Assemblée nationale des bahá’ís des États-Unis. « C’est ainsi que nous pouvons mobiliser l’opinion locale et nous sommes habilités à prendre contact avec les sénateurs, quel que soit l’État qu’ils représentent, pour défendre la Convention. »
Cette démarche des bahá’ís des États-Unis traduit la détermination de la communauté mondiale bahá’íe de prendre part à la défense des droits de l’homme, d’une manière générale, et à celle de la formation dans ce domaine, en particulier - et cette démarche se fait plus pressante à l’approche du 50ème anniversaire de la Déclaration universelle des droits de l’homme.
Adoptée par l’Assemblée générale des Nations Unies le 10 décembre 1948, la Déclaration est un document simple mais bien rédigé, qui, selon ses propres termes, reconnaît que « la dignité et les droits égaux et inaliénables de tous les membres de la famille humaine sont le fondement de la liberté, de la justice et de la paix dans le monde ». Elle définit non seulement les droits civils et politiques fondamentaux, comme la liberté de pensée, de conscience et de religion mais aussi les droits économiques, sociaux et culturels fondamentaux, comme le droit à l’emploi et le droit à l’éducation.
L’Organisation des Nations Unies, ainsi que divers gouvernements et organisations non gouvernementales (ONG) prévoient des manifestations pour célébrer l’anniversaire de la Déclaration en 1998 qui tombe en même temps que la quatrième Décennie de l’éducation en matière de droits de l’homme (1994-2004). Les bahá’ís espèrent être le fer de lance de ces activités.
En octobre 1997, par exemple, le bureau bahá’í auprès des Nations Unies a envoyé aux communautés nationales affiliées à travers le monde un dossier entier d’informations sur les droits de l’homme. Le but est de soutenir les communautés bahá’íes qui sont de plus en plus engagées dans la promotion des droits de l’homme dans leurs pays.
« Historiquement, la communauté mondiale bahá’íe appuie depuis toujours les programmes et activités des Nations Unies en faveur des droits de l’homme », dit Nikoo Mahboubian, qui représente la Communauté internationale bahá’íe auprès des Nations Unies. « L’un de nos principaux objectifs est de contribuer à l’éducation en matière des droits de l’homme en montrant la relation entre le respect des droits de l’homme et l’émergence de la paix dans le monde. »
Mme Mahboubian rappelle que dès 1947, la communauté avait fait une déclaration importante en faveur des droits de l’homme. Depuis, les communautés bahá’íes du monde entier ont participé à de nombreuses activités pour défendre cette cause. Elles ont notamment œuvré à la ratification des différentes conventions des droits de l’homme, contribué à la diffusion (et à la traduction) des documents des droits de l’homme et organisé différentes commémorations de la Journée des droits de l’homme.
Mobilisation au niveau mondial
Pour préparer cette commémoration, de nombreuses communautés nationales bahá’íes viennent de mettre sur pied différentes activités :
• En Turquie, la communauté bahá’íe a prêté son concours à l’organisation d’une conférence des ONG sur la Décennie. Parrainée par le Sommet des ONG sur la femme en Turquie, dont la communauté bahá’íe fait partie, la conférence du 8 décembre 1997 a rassemblé des orateurs très divers dont Mme Sema Piskinsut, membre du Parlement et présidente de la Commission gouvernementale des droits de l’homme.
• En Norvège, la communauté bahá’íe s’est jointe à d’autres ONG pour préparer la commémoration nationale du 50ème anniversaire de la Déclaration universelle. Avec l’appui du Département des Affaires étrangères, le groupe prépare une conférence internationale qui doit se tenir à Oslo au mois d’août 1998 sur le thème : « La Conférence d’Oslo sur la liberté de religion ou de croyance. Relever le défi : Créer un mouvement pour protéger la liberté universelle de religion ou de croyance. »
• Au Brésil, la communauté bahá’íe a coparrainé une grande conférence sur les droits de l’homme en septembre dernier. Organisée par l’Association du barreau brésilien, la « Première conférence internationale sur les droits de l’homme » s’est tenue à Brasilia et a accueilli plus de 1 000 participants. Parmi les autres parrains figuraient l’UNESCO et le Ministère brésilien de la Justice et des Affaires étrangères.
• Au Canada, les bahá’ís prévoient de lancer une campagne pour mettre au point des moyens audio-visuels et des documents en vue du 50ème anniversaire de la Déclaration universelle des droits de l’homme. « Nous espérons susciter une prise de conscience plus grande du fait que nous formons véritablement une famille humaine, que chaque individu est venu au monde comme un élément du tout et que la violation des droits d’un seul membre de la famille constitue une violation des droits de tous les êtres humains », dit Gerald Filson, directeur des Affaires extérieures de la communauté.
• Aux États-Unis, la communauté bahá’íe a été invitée par l’Institut Franklin et Eleanor Roosevelt à faire partie du comité directeur d’une campagne nationale pour la commémoration du 50ème anniversaire de la Déclaration universelle des droits de l’homme.
L’Assemblée bahá’íe des États-Unis copréside avec Amnesty International la campagne en faveur de la ratification de la Convention sur l’élimination de toutes les formes de discrimination à l’égard des femmes. Selon Mme Cosby, elle espérait recueillir l’appui d’au moins 75 sénateurs.
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