Revue n° 38-39, 1999
La rédaction de la Charte de la terre est un modèle de consensus international
SAN JOSE, Costa Rica — Depuis son secrétariat international installé dans ce pays tropical luxuriant, le Conseil de la terre coordonne ce qui pourrait être le projet de rédaction du document le plus imposant jamais rédigé par la société civile.
Depuis 1995, le Conseil a intensifié ses efforts visant à rédiger une Charte de la terre, déclaration de principes éthiques analogue à la Déclaration des droits de l’homme de l’ONU, que ses auteurs espèrent voir guider la conduite des peuples et des nations afin de garantir la paix, l’égalité et un avenir durable.
D’ici à 2002, une version définitive du document devrait être présentée à l’Assemblée générale de l’ONU, laquelle pourrait l’approuver en tant que déclaration internationale.
En rédigeant un texte minutieusement examiné et approuvé par de très nombreux groupes et secteurs de la société civile, les organisateurs espèrent que les décideurs politiques y accorderont de l’importance.
« La grande différence entre la Charte de la terre et d’autres documents internationaux du même type tient au fait que la première procède d’une large participation », dit Mirian Vilela, coordinatrice du projet de Charte de la terre pour le Conseil. « Nous ne voulons pas seulement publier un gros document, mais aussi réaliser la diversité culturelle ; nous voulons faire participer les individus en leur donnant le sentiment qu’ils sont engagés et ont des intérêts à défendre. »
Mme Vilela précise que certaines ONG ont constitué des comités nationaux pour la Charte de la terre dans 40 pays, et que des groupes spéciaux travaillent sur la Charte dans 23 autres pays. Au total, dit-elle, des centaines, voire des milliers d’organisations, ainsi que des milliers de personnes, ont étudié et commenté la Charte.
« La contribution internationale est possible grâce à plusieurs facteurs », explique Steven C. Rockefeller, président du Comité de rédaction. « Avec le courrier électronique et l’Internet, nous pouvons communiquer de façon extraordinaire et accélérer les décisions. Nous voyageons également à travers le monde et participons à des conférences afin d’être le plus objectif possible. »
Pour M. Rockefeller, l’idée de faire participer le plus grand nombre possible de personnes s’est révélée efficace car un projet acceptable pour la majorité a pu être élaboré. Par exemple, les auteurs du projet ont mûrement réfléchi à la participation des Aborigènes.
Après avoir consulté les Inuits des régions du grand Nord, ils ont compris que ces derniers voulaient supprimer un paragraphe du projet concernant la nécessité « de traiter tous les êtres avec compassion ».
« Les Inuits du grand Nord sont entièrement tributaires de la chasse et n’ont pas d’agriculture », dit M. Rockefeller. « Ils ne voulaient pas que le mot ‘compassion’ soit utilisé à propos des animaux car ils pensent qu’il est impossible de chasser avec ‘compassion’. Ils craignaient aussi que les associations pour les droits des animaux ne les obligent à renoncer à la chasse traditionnelle. »
« Le comité de rédaction a finalement modifié le texte», dit M. Rockefeller. « Nous avons enlevé le mot ‘compassion’ et l’avons remplacé par ‘traiter tous les êtres vivants avec respect et considération’ et ils ont accepté. »
En tant que concept, la Charte de la terre a été proposée pour la première fois en 1987 par la Commission Brundtland. Dans un premier temps, il semblait que les gouvernements allaient approuver une Charte de la terre au Sommet de la terre de Rio en 1992. Ces derniers n’ayant pas réussi à trouver un consensus à ce sujet, les ONG ont décidé de poursuivre le processus de rédaction sous la coordination du Conseil de la terre.
Depuis le début du processus, la Communauté internationale bahá’íe a été un partenaire actif.
« La Charte de la terre est peut-être la meilleure expression des principes du développement durable jamais présentés dans un document succinct », dit Peter Adriance, représentant bahá’í qui milite au sein du réseau américain de la Charte. « La Charte défend le principe clé de Bahá’u’lláh, celui de l’unité de l’humanité. Lorsque ce principe se fera d’avantage connaître, il devrait être un guide important pour une vie durable sur la Terre au 21ème siècle et au-delà. »
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